Qui est vraiment à l’aise avec la règle du congé de fractionnement ?
Si cette règle n’est pas toujours appliquée en entreprise, c’est non seulement parce qu’elle est difficile à comprendre, mais en plus, elle ne fait pas l’unanimité parmi les employeurs, comme les salariés.
Pour vous faire votre opinion, commençons par rappeler le principe et la méthode de calcul.
Qu’est-ce que les congés de fractionnement ? Doit-on y renoncer ?
Les congés de fractionnement sont applicable aux employeurs et salariés de droit privé.
Téléchargez notre modèle de renonciation des jours de fractionnement.
Congés de fractionnement : Le Principe
Tout salarié peut bénéficier de jours de congés payés supplémentaires appelés « jours de fractionnement », s’il remplit certaines conditions.
Pour en bénéficier, le salarié doit fractionner son congé principal. On parle ici de ses 4 semaines de congés payés, c’est-à-dire de 24 jours ouvrables de congés, qui ne doivent pas être pris de manière consécutive.
C’est à condition que ses 4 semaines de congé n’aient pas été prises dans leur intégralité au cours de la période légale de prise du congé, c’est-à-dire la « période d’été » allant du 1er mai au 31 octobre, que le salarié fractionne ses congés. Il prend en plusieurs fois son congé principal. C’est ce fractionnement qui lui permet de bénéficier de jours supplémentaires de congés payés.
Pourquoi le salarié acquiert-il des jours supplémentaires de congés ? Parce qu’il n’a pas pris son congé principal de manière consécutive sur la période la plus propice à la prise de congés : la « période d’été ». Il a pris ses congés en plusieurs fois, certains sur la « période d’été », d’autres sur la « période d’hiver », ce qui lui donne droit à des jours supplémentaires.
D’accord, mais euh … n’est-ce pas le souhait de la plupart des salariés de prendre 3 semaines en été, 1 semaine en hiver et 1 semaine en avril ? … Oui ?! Bon, fractionnement pour tous !
Pour en savoir plus sur les congés payés, consultez notre article : Congés payés : Organisez les vacances de vos salariés
Congés de fractionnement : La méthode de calcul
Finalement, le nombre de jours supplémentaires de congés dépend du nombre de jours du congé principal pris en dehors de la période légale, c’est-à-dire au cours de la « période d’hiver » allant du 1er novembre au 30 avril.
Le salarié acquiert deux jours ouvrables de congés supplémentaires lorsqu’il reporte au moins six jours ouvrables de ses congés sur cette période hivernale. Il acquiert un seul jour ouvrable de congé supplémentaire s’il y reporte entre 3 et 5 jours.
NB : La 5ème semaine de congés payés est, elle, toujours exclue du calcul du fractionnement.
Employeurs, restez vigilants ! Le principe et la méthode de calcul présentées ici ne s’appliquent qu’en l’absence de règles fixées par accord ou convention collective.
L’analyse de notre Juriste
Quelle condition remplir ?
- Le salarié doit prendre au moins 12 jours ouvrables de congés en continu sur la période du 1er mai au 31 octobre.
Combien de jours de fractionnement sont générés ?
Le nombre de jours ouvrables supplémentaires de congés dépendra du nombre de jours de congé principal pris en dehors de la période légale.
- Le salarié prend entre 3 et 5 jours ouvrables de congés sur la période du 1er novembre au 30 avril : il acquiert un jour de fractionnement,
- Le salarié prend 6 jours ouvrables minimum de congés sur la période du 1er novembre au 30 avril : il acquiert deux jours de fractionnement.
L’accord des deux parties
Qu’elle soit mise en œuvre par l’employeur ou par le salarié, le fractionnement des jours de congés implique l’accord des deux parties.
Si le salarié demande à son employeur de fractionner la prise de ses congés, pour ainsi pouvoir bénéficier de jours supplémentaires, l’employeur est libre d’accepter, de refuser ou d’accepter sous réserve de la renonciation à l’octroi de jours supplémentaires.
En revanche, en cas de fermeture de l’entreprise pour congés payés décidée par l’employeur l’accord du salarié n’est pas nécessaire.
La renonciation au fractionnement
Il est possible de renoncer aux jours de fractionnement en entreprise. Pour cela, l’employeur devra recueillir un accord individuel exprès du salarié, comme par exemple, un formulaire de demande de congés mentionnant que le fractionnement des congés vaut renonciation.
Bon à savoir ! Un formulaire de demande de congés peut comporter une formulation de renonciation aux éventuels jours de fractionnement, telle que : « la période de prise du congé principal (droits à congé hors 5e semaine et congé d’ancienneté) s’étend du 1er juin au 31 octobre. Durant cette période, il devra être pris obligatoirement quatre semaines de congés payés dont trois semaines consécutives. Pour toute demande de dérogation à cette règle, le salarié renonce aux congés de fractionnement » (cass. soc. 30 septembre 2014 n°13-13.315).
Employeurs, restez vigilants ! Il n’est pas possible de renoncer par avance aux congés de fractionnement. Une clause contractuelle en ce sens insérée au contrat de travail ne serait pas valide (cass. soc. 5 mai 2021 n°20-14.390). Le refus d’accorder des jours supplémentaires au salarié n’ayant pas préalablement renoncé au bénéfice des jours de fractionnement est passible d’une contravention de 5ème classe (cass. soc. 8 juin 1972 n°71-40.328).
La renonciation peut également être collective, lorsqu’elle résulte d’un accord d’entreprise ou d’établissement ou encore d’une convention collective. Dans ce cas, l’accord individuel de renonciation n’est pas nécessaire.
Les salariés exclus de la règle
Les salariés qui prennent leurs 5 semaines de congés de manière continue, à savoir ceux qui justifient de contraintes géographiques particulières ou de présence ou foyer d’un enfant ou d’un adulte handicap ou d’une personne âgée en perte d’autonomie, ne fractionnent pas leurs congés. Le renoncement au fractionnement des congés leur fait perdre le droit à congé supplémentaire.
Exemples chiffrés
Virgile a acquis 30 jours ouvrables de congés payés (5 semaines) au 1er juin.
En août, il prend 18 jours ouvrables consécutifs de congés.
En décembre, il prend 12 jours ouvrables consécutifs de congés (dont 6 jours de la 5ème semaine de congé).
Il a donc acquit 2 jours ouvrables de congés supplémentaires.
Olivia est arrivée en fin d’année et a acquis 15 jours ouvrables de congés payés au 1er juin.
En avril, elle avait pris 3 jours par anticipation. En juillet, elle solde en prenant 12 jours ouvrables consécutifs de congés.
Elle a donc acquit 1 jour ouvrable de congé supplémentaire.
Source : Articles L. 3141-17 à 23 du Code du travail