Depuis la crise du Covid, et la fermeture temporaire des entreprises, le télétravail s’est largement répandu dans tous les secteurs d’activités.
Dans un marché du travail aussi tendu, et compte tenu des difficultés de recrutement que nous vivons toutes et tous, le télétravail n’est plus un avantage concurrentiel.
Aujourd’hui, c’est une nécessité.
Ainsi, proposer le télétravail renforce votre marque employeur, facilitant à la fois l’attractivité et la rétention des meilleurs talents.
Cela étant dit, revoyons ensemble les règles de mise en place, ainsi que les quelques cas particuliers que vous pourrez rencontrer.
Comment mettre en place le télétravail ?
Il existe plusieurs modalités de mise en place du télétravail :
- L’accord collectif, comme une convention collective ou un accord de branche
- La charte de télétravail, établie par l’employeur après avis du CSE
- Un accord individuel entre le salarié et l’employeur
Ces modalités sont applicables de façon hiérarchique. Autrement dit, on réalisera la modalité suivante si la (les) modalité(s) précédente(s) n’existent pas.
Peu importe la forme du texte mettant en place le télétravail, celui-ci doit notamment préciser :
- Les conditions de passage en télétravail et de retour au poste sans télétravail. ex : autonomie, ancienneté, etc.
- Les modalités d’acceptation de la mise en place du télétravail par le salarié. ex : oral, écrit
- Les modalités d’organisation et de contrôle du télétravail. ex : lieu, moyens de surveillance, etc.
L’employeur peut-il imposer le télétravail ?
En principe, le télétravail résulte d’un accord entre le salarié et l’employeur. Cependant, il peut arriver que l’employeur se voie contraint d’imposer le télétravail à ses salariés. Notamment en cas de force majeure.
Cette décision relève de son pouvoir de direction, mais il devra tout de même consulter le CSE lorsque celui-ci existe.
C’est notamment le cas pour l’aménagement du poste de travail recommandé par le médecin du travail. Cet avis est contraignant pour l’employeur, qui doit faire en sorte de le respecter.
Cependant, il est possible pour l’employeur de ne pas aménager le poste de travail. Par exemple, lorsque le salarié, reconnu handicapé, est placé en temps partiel en télétravail par le médecin du travail.
Dans ce cas, le licenciement pour inaptitude est justifié du fait de son éloignement qui l’empêche de réaliser correctement ses fonctions.
CA Paris, 07 septembre 2016, n°14.06163
Le télétravail est-il conditionné au travail au sein du domicile ?
Le télétravail est souvent compris comme le travail à son domicile. Or, ce n’est pas le seul endroit où le télétravail peut être réalisé. En effet, tout lieu permettant l’exercice des fonctions du salarié peut être légitime dans le cadre du télétravail.
Toutefois, l’accord collectif, la charte télétravail ou l’accord individuel peut prévoir la liste des lieux de télétravail autorisés. Il est également possible de prévoir une limite d’éloignement pour éviter que le salarié n’ait plus la capacité d’exercer correctement ses fonctions.
Pour en savoir plus à ce sujet, consultez notre article : Le télétravail doit il nécessairement s’effectuer à domicile ?
Est-il possible pour le salarié de télétravail à l’étranger ?
Oui, la loi n’impose pas de lieu pour travailler et n’empêche pas le télétravail à l’étranger. Cette modalité est donc laissée au choix de l’accord collectif, de la charte ou de l’accord individuel. En cas d’accord de l’employeur, il est préférable de réclamer des garanties d’exécution normale du contrat de travail par le salarié.
Attention, le passage en télétravail à l’étranger peut entraîner des conséquences sur le droit applicable. Il faut notamment savoir si le télétravail sera ponctuel ou s’il sera mis en place de façon pérenne.
En principe, l’employeur et le salarié choisissent ensemble la loi applicable au contrat de travail. Cependant, en l’absence d’un choix, le droit européen prévoit une recherche hiérarchique de la loi applicable :
- La loi du pays dans lequel le salarié accomplit habituellement son travail. Le travail temporaire dans un autre pays n’entraîne pas le changement de la loi applicable.
- La loi du pays dans lequel l’établissement d’embauche est situé.
- La loi du pays avec lequel le contrat a des liens plus étroits.
En temps normal, le télétravail dans son État de résidence est assujetti à la sécurité sociale du lieu de résidence à compter d’un certain seuil. Ce seuil équivaut à 25% du temps travaillé dans l’État de résidence.
Dans le contexte de la crise Covid, un arrangement européen supprime cet assujettissement automatique, même en cas de dépassement du seuil des 25%. Récemment, le ministère du Travail a prolongé que cette mesure jusqu’au 30 juin 2023.
Le saviez-vous ?
Récemment, la France a signé un accord-cadre multilatéral permettant le maintien de l’assujettissement à la sécurité sociale de l’Etat d’emploi des travailleurs frontaliers.
Ce maintien concerne les salariés travaillant moins de 50% de leur temps de travail dans leur Etat de résidence. Pour pouvoir bénéficier de maintien, le site du CLEISS précise que le travail effectué dans l’Etat de résidence doit représenter 49% du temps de travail du salarié au maximum.
Exemple : Marc est un salarié belge travaillant pour un employeur français à temps complet, soit pour un contrat de 35 heures hebdomadaires. Dans le cadre du télétravail, il travaille 17,5 heures par semaine en Belgique, où se trouve son domicile.
Il ne peut pas bénéficier du maintien puisqu’il travaille 50% de son temps de travail dans son Etat de résidence.
Suis-je obligé d’attribuer des tickets-restaurant aux télétravailleurs ?
La question a été tranchée : oui, en vertu du principe d’égalité de traitement, le salarié en télétravail a droit aux tickets-restaurant.
Ainsi, même s’il peut se restaurer chez lui, tout collaborateur en télétravail bénéficie des mêmes droits que ceux travaillant au sein des locaux. Vous êtes donc dans l’obligation de fournir des tickets restaurants dès lors qu’ils existent dans votre entreprise.
Pour en savoir plus à ce sujet, consultez notre article : Les salariés en télétravail peuvent-ils bénéficier de titre-restaurant ?
L’employeur doit-il rembourser les frais professionnels engendrés par le télétravail ?
Légalement, l’employeur n’est pas obligé de rembourser ces frais mais il est primordial de vérifier votre convention collective : en effet, elle peut prévoir le remboursement des frais de télétravail.
Le Médecin du travail peut imposer le télétravail afin de sauvegarder la santé d’un collaborateur. Dans cette mesure, l’employeur doit obligatoirement rembourser les frais professionnels subits par le collaborateur. Cette obligation s’impose peu important que le collaborateur ait à sa disposition un local professionnel (arrêt du 21 décembre 2023).
Le remboursement des frais professionnels peut être sous forme d’allocation forfaitaire ou basé sur les frais réels.
Nombre de jours de télétravail par semaine | Limite maximale d’exonération par mois |
---|---|
1 | 10,70 € |
2 | 20,80 € |
Si l’allocation forfaitaire est fixée quotidiennement, son montant maximal journalier est de 2,70 €, dans la limite de 59,40 € par mois.
Enfin, si votre convention collective prévoit une allocation forfaitaire, les limites sont augmentées. Pour l’allocation forfaitaire journalière, son montant maximal est de 3,25 € dans la limite de 71,50 € par mois.
Nombre de jours de télétravail par semaine | Limite maximale d’exonération par mois |
---|---|
1 | 13 € |
2 | 26 € |
Type de frais | Remboursement par l’employeur | Exonérations |
---|---|---|
Achat de matériel | Tous les frais | Exclusion de la base de calcul à 50% |
Prêt de matériel | Pas de remboursement | Pas d’exonération |
Adaptation du local et mise en conformité | Remboursement des frais réels | Exclusion de l’assiette des cotisations |
Affectation de l’habitation au travail | Remboursement des frais fixes et des frais variables | |
Consommables et frais informatiques | Remboursement des frais réels | Exclusion de l’assiette des cotisations |
Ces remboursements de frais font l’objet d’une déclaration au sein de la DSN. Ils doivent donc être renseignés parmi les « Autres éléments de revenu brut ».
Pour en savoir, n’hésitez pas à consultez nos articles : Frais professionnels télétravail : Remboursement et exonérations
Quelle attention porter au droit à la déconnexion ?
Préférez la négociation annuelle obligatoire pour discuter des modalités d’exercice du droit à la déconnexion des salariés. Sinon, établissez une charte en consultation avec le CSE
Rien ne vous empêche de discuter directement avec le salarié des horaires de travail auxquels il doit être joignable. Ainsi, les horaires redéfinis vous permettront d’assurer le respect de la vie privée du salarié, et de garder un contact raisonnable avec lui.
Par exemple, pensez à utiliser l’envoi de mails différés afin de ne pas solliciter l’attention immédiate de vos collaborateurs tôt le matin ou tard le soir.
Enfin, pensez à ne pas envoyer de mail à vos collaborateurs lors de leurs jours de repos, notamment en cas de temps partiel. L’envoi de mails différés est également une bonne solution.
Est-il possible de surveiller l’activité de mes salariés en télétravail ?
Oui, il est tout à fait possible d’utiliser les mêmes méthodes qu’en présentiel.
Nous pensons notamment aux outils de gestion du temps, aux points réguliers avec les managers, aux limitations d’accès à internet ou encore aux contrôles de leur messagerie électronique.
Toutefois, veillez à bien être conforme aux directives de la CNIL en la matière :
- La consultation préalable du CSE
- L’information du salarié sur les modes de surveillance, sur les dispositions légales et internes à l’entreprise en matière de protection des données
- La limitation de la surveillance à sa pertinence et sa proportion envers l’objectif poursuivi
Exemple : un rapport de la CNIL établit que l’obligation de partager en permanence son écran est une méthode de surveillance abusive.
Sources : Télétravail dans le secteur privé, service-public.fr