Cet article « Maternité et contrat de travail – Extrait de l’Act’Unit RH » est un extrait de la Newsletter parue le Vendredi 18 octobre 2024. Pour vous y inscrire, c’est juste ICI !
L’annonce de la grossesse et ses effets
L’annonce de la grossesse
Le Code du travail n’impose pas à la salariée enceinte de prévenir son employeur. Mais la salariée enceinte a droit à certains avantages et pour en profiter, elle doit informer son employeur.
Par quel moyen ? Le Code du travail prévoit que la salariée remet son certificat médical attestant son état de grossesse et la date présumée de son accouchement ou la date effective de celui-ci. (Article R.1225-1 du Code du travail).
Comme pour chaque information, la salariée peut soit la remettre en mains propres contre récépissé ou l’envoyer par lettre recommandée avec avis de réception ou électronique.
Une fois l’information connue par l’employeur, la salariée est protégée !
La protection de la salariée
Alors de quelle protection parle-t-on ?
- L’application du principe de non-discrimination : en aucun cas l’employeur ne peut écarter la salariée du bénéfice d’une mesure en fondant ta décision sur son état de grossesse ou de maternité.
La Cour de cassation a eu l’occasion de se pencher sur des cas concrets.
Elle a pu décider que l’employeur avait fait preuve de discrimination en raison de l’état de grossesse ou de congé maternité de la salariée si :
- elle n’a pas été promue ou eu un retard de promotion
- elle a été mutée en raison de sa grossesse
- la protection de la santé de la femme enceinte en lui permettant de bénéficier :
- d’un suivi médical adapté auprès du service de santé au travail,
- d’autorisations d’absence pour se rendre aux examens obligatoires (articles L.1225-16 et suivants du Code du travail)
- d’une interdiction d’occuper des postes présentant des risques pour la santé ou la sécurité,
- d’une interdiction d’emploi pendant une période de 8 semaines, avec au moins 6 semaines après son accouchement. Une salariée ne peut pas travailler pendant cette période ! (Article L.1225-29 du Code du travail)
La salariée enceinte sur un poste à risques
Que se passe-t-il si la salariée tombe enceinte alors qu’elle occupe un poste à risques ?
Il est possible de la muter temporairement à un autre poste. Soit de sa propre initiative soit de celle de la salariée. La prescription est faite soit par le médecin traitant soit par le médecin du travail s’il est à l’initiative de la mutation temporaire ou qu’un désaccord apparaît (article L.1225-7 du Code du travail).
Il y a des cas où il n’y aura pas de poste disponible. Dans cette situation, le contrat de travail de la collaboratrice et sa rémunération devra être maintenue (Cass.soc 12 décembre 1997 n°94-44.833).
Dans tous les cas, à son retour de congé maternité, la salariée retrouve son poste initial, sauf si elle travaille de nuit ou sur un poste l’exposant à des risques particuliers. Ici, la « mutation » temporaire pourra se prolonger à son retour (articles L.1225-9 et suivants du Code du travail).
L’information à la CPAM
La salariée doit également informer la Caisse Primaire d’Assurance Maladie qui en retour lui transmettra ses dates de congé maternité.
En effet, les dates de départ et de retour en congé maternité sont calculées par rapport à la date présumée d’accouchement. Elle peut ensuite te transmettre le courrier reçu de la part de sa Caisse.
Attention : les dates varient en fonction du nombre d’enfants à charge.
Le départ en congé et ses effets
Pendant le congé maternité, le contrat de travail de la collaboratrice est suspendu pendant la période de congé maternité.
La durée du congé maternité
Pour l’arrivée du premier ou du deuxième enfant, le congé maternité est d’une durée totale de 16 semaines : 6 semaines avant la date présumée de l’accouchement et 10 semaines après (article L.1225-17 du Code du travail).
Pour l’arrivée du troisième enfant, on ajoute 10 semaines pour passer à une durée totale de 26 semaines de congé maternité : 8 semaines prénatales et 18 semaines postnatales (article L.1225-19 du Code du travail).
Attention : ici le Code du travail nous apporte une précision qui a son importance. Il écrit « lorsque, avant son accouchement, la salariée elle-même ou le foyer, assume déjà la charge de deux enfants au moins ou lorsque la salariée a déjà mis au monde au moins deux enfants nés viables… »
Cela sous-entend que la salariée qui se trouve enceinte, peut-être pour la première fois, mais dont son foyer assume la charge de 3 enfants nés d’une précédente relation, aura droit au congé de 26 semaines !
On ne s’arrête pas là, puisque le cas des grossesses multiples est lui aussi pris en compte (Article L.1225-17 du Code du travail) pour des jumeaux, la durée du congé maternité est de 34 semaines (12 semaines prénatales et 22 semaines postnatales).
Pour des triplés ou plus, on est sur 46 semaines de congés (autant dire que pendant presque 1 an tu ne vois pas ta collaboratrice !) qui se décomposent en 24 semaines prénatales et 22 semaines postnatales.
Ces durées ne sont pas figées dans le marbre : il est possible pour la salariée de demander à partir un peu plus tard et revenir du coup un peu plus tard s’il n’y a aucune contre-indication médicale (article L.1225-17 du Code du travail).
Les effets de la suspension du contrat de travail
Qui dit suspension du contrat de travail dit que la salariée ne doit pas effectuer sa prestation de travail. Récemment la Cour de cassation a d’ailleurs pu nous en parler : le simple fait qu’une collaboratrice travaille pendant son congé maternité lui cause un préjudice ouvrant droit à la réparation automatique et donc à l’octroi de dommages et intérêts. (Cass.soc 4 septembre 2024 n°22-16.129)
Un raisonnement similaire avait été adopté par la Cour de cassation lorsqu’un employeur avait demandé à sa collaboratrice d’écourter son congé maternité. (Cass.soc 7 janvier 1992 n°87-44.428).
Si le contrat est suspendu, il ne suspend pas :
- l’ancienneté de ta collaboratrice (Article L.1224-24 du Code du travail)
- l’acquisition des congés payés (Article L.3141-5 du Code du travail)
Côté rémunération, pendant son congé maternité, la collaboratrice perçoit des indemnités journalières de Sécurité sociale si elle en remplit les conditions à savoir :
- 6 mois d’affiliation à la Sécurité sociale à la date présumée de l’accouchement
- avoir perçu 1015 fois le SMIC horaire au cours des 6 derniers mois ou avoir travaillé au moins 150 heures au cours des 90 derniers mois ou 3 mois civils, le tout avant la date présumée de conception (pour une indemnisation jusqu’à 6 mois). (Article L.131-1 du Code de la Sécurité sociale)
Du coup, à son départ en congé maternité, l’entreprise doit établir l’attestation de salaire de sa collaboratrice.
Le Code du travail ne prévoit pas un maintien de la part de l’employeur pendant le congé maternité, mais la Convention collective peut le faire !
La naissance avant la date présumée fait-elle revenir la salariée plus tôt ? Hé non !
Le Code du travail prévoit ce cas de figure et précise que le congé maternité est prolongé au terme de la durée totale à laquelle la salariée avait droit. (Article L.1225-20 du Code du travail). Le salarié de ces possibilités, mais tu dois également prévenir ton ou tes organismes assureurs de la fin du contrat.
La rupture du contrat du travail pendant la maternité
En termes de protection, on distingue deux périodes.
La protection relative
Une première période dite de protection « relative ». Elle encadre le congé maternité.
Ainsi à compter du moment où tu as connaissance jusqu’au départ en congé maternité de la salariée, la salariée ne peut être licenciée que pour faute grave ou impossibilité de maintien du contrat (articles L.1225-4 et suivants du Code du travail).
D’où le terme « relative », la protection existe, mais n’est pas totale !
Si la collaboratrice est en CDD, le fait d’être protégée n’empêche pas qu’arrive le terme du CDD. Ainsi, si le CDD prenait fin à une date pendant son congé maternité, alors il prend fin.
Cette même période de protection relative redémarre pour 10 semaines au retour de la salariée à son poste de travail.
Fais attention : si la salariée accole des congés payés à la fin de son congé maternité, la protection absolue fonctionne encore. La protection relative va démarrer uniquement à sa reprise de poste !
La protection absolue
À côté de la protection relative, on trouve donc la protection dite « absolue ». Elle prend effet pendant le congé maternité. Dans ce cas-là, il est impossible pour de licencier la salariée, pour quelque motif que ce soit.
En cas de licenciement prononcé au cours de cette période de protection, l’employeur encourt la nullité du licenciement et toutes les conséquences que j’ai déjà pu décrire au cours d’une précédente newsletter.
Si une collaboratrice n’a pas informer l’employeur de son état de grossesse, elle peut solliciter l’annulation de la décision en adressant un certificat médical dans les 15 jours à compter de la notification de la rupture de son contrat de travail. (Article L.1225-5) Cependant, si l’employeur avait prononcé un licenciement pour faute grave ou pour impossibilité de maintenir le contrat et cela sans lien avec l’état de grossesse, alors la demande d’annulation n’est pas permise. Ainsi jugé que le collaborateur lésé disposait d’un délai de 5 ans pour agir (Cass.soc 26 juin 2024 n°22-17.240).