Cet article « La maladie – Extrait de l’Act’Unit RH » est un extrait de la Newsletter parue le Vendredi 3 Novembre 2023. Pour vous y inscrire, c’est juste ICI !
L’arrêt maladie en pratique
Un salarié qui tombe malade et ne se présente pas à son poste doit fournir un certificat médical d’arrêt de travail afin que son absence soit considérée comme justifiée.
En fonction de la convention collective, le délai de transmission de la justification peut varier. Le délai légal est lui de 48 heures. ⏱️
En plus de prévenir l’employeur, le salarié doit également transmettre son certificat médical à sa Caisse primaire d’Assurance maladie. Cette transmission va lui permettre de percevoir les indemnités journalières de Sécurité sociale (IJSS).
L’employeur, dès la réception du certificat médical d’arrêt de travail du collaborateur, vas devoir accomplir certaines formalités.
La première consiste à établir une attestation de salaire dès réception de l’avis d’arrêt de travail. Cette attestation permet d’examiner le droit aux indemnités journalières, de réaliser leur calcul et leur versement. (Article R.323-10 du Code de Sécurité sociale)
Ensuite, l’employeur devra verser, sous conditions d’attributions, des indemnités complémentaires (article L.12261-1 du Code du travail). Le Code du travail prévoit ces conditions, mais il est nécessaire de vérifier la convention collective. Elle peut prévoir des conditions plus favorables pour le salarié pour ce maintien de salaire.
Ce maintien de salaire va avoir des incidences sur la subrogation. Le maintien et la subrogation ne sont pas la même chose !
En effet, en cas de maintien (total ou partiel), la subrogation peut être mise en œuvre. Elle permet à l’employeur de recevoir les IJSS à la place du salarié dont le salaire est maintenu.
On distingue deux situations :
- Si le maintien de salaire est total sur le brut : la subrogation est alors de plein droit. L’employeur n’a donc pas à demander l’autorisation du salarié pour mettre en œuvre la subrogation.
- Si le maintien de salaire se fait sous déduction des IJSS, l’employeur peut être subrogé s’il fait l’avance des IJSS.
Comment faire la demande de subrogation ?
Elle se fait via la Déclaration Sociale Nominative (DSN) signalant l’arrêt de travail. Elle sera transmise aux organismes sociaux concernés et déclenchera le paiement des prestations. On parle de DSN événementielle.
Dès que l’attestation de salaire via ton logiciel de paie est transférée, une DSN événementielle doit être réalisée.
Les effets de la maladie sur le contrat de travail
Lorsque ton salarié est en arrêt de travail pour maladie, son contrat de travail est suspendu. Ainsi, il n’a pas à exécuter sa prestation de travail.
Si ce principe est méconnu, ou si l’employeur autorise le salarié de travailler alors qu’il est en arrêt, ce dernier s’expose à une condamnation ! En effet, la Cour de cassation a déjà condamné un employeur à payer à son collaborateur les IJSS qu’il avait perçues alors même qu’il avait continué de travailler. (Cass.soc 15 juin 1999, n°96-44.772).
Quand le salarié est malade pendant la période d’essai, la période d’essai est prolongée d’autant de jours que celui de l’arrêt de travail. On parle ici en jours calendaires !
Par ailleurs, la maladie a des conséquences sur le calcul de l’ancienneté de ton salarié. Même si la maladie n’a pas pour effet d’interrompre l’ancienneté, elle peut être déduite pour le calcul de l’indemnité de licenciement par exemple.
Il est toujours important de vérifier ta Convention collective qui peut prévoir des dispositions plus favorables que la loi.
Un salarié absent pour maladie reste comptabilisé dans ton effectif. Et ce, même si un CDD de remplacement est conclu . En effet, c’est le remplaçant qui est exclu du calcul et non le remplacé !
Si ton salarié bénéficie d’un avantage en nature et qu’il tombe malade, ce dernier ne peux lui être retiré sauf si une disposition conventionnelle ou contractuelle le prévoit. (Cass.Soc 24 mars 2010 n°08-43.996).
La maladie en période de préavis n’a pas pour effet de le suspendre. Et si un préavis commence alors que ton collaborateur est en arrêt maladie, il débute bien à compter de la notification et non à la fin de l’arrêt maladie.
La maladie ne peut en aucun cas être un motif de licenciement. Mais aucune protection spécifique n’existe comme c’est le cas en matière d’accident du travail ou de maladie professionnelle.
Ainsi, un salarié pourra être licencié pour un motif économique ou disciplinaire en fonction des circonstances.
Il est possible de licencier un salarié dont les conséquences de l’absence perturbent le fonctionnement de l’entreprise et que le remplacement définitif du salarié malade est nécessaire. (Cass.soc 13 mars 2001,n°99-40.110) Il peut s’agir d’une absence longue ou d’absences répétées.
Dans ce cas, n’oublie pas de consulter ta Convention collective qui peut prévoir une garantie d’emploi. Cette garantie t’interdit de licencier un collaborateur malade pendant une certaine période même si les conditions issues de la jurisprudence sont réunies.
Il est donc primordial de vérifier à la fois le Code du travail, celui de la Sécurité sociale et tes accords collectifs concernant le traitement de la maladie.
L’arrêt de travail et l’acquisition des congés payés
Depuis le 13 septembre dernier, la Cour de cassation s’est conformée au droit européen en matière d’acquisition de congés payés pendant la maladie.
Si certaines conventions collectives le prévoyaient déjà, désormais la règle pour tous est la suivante : un salarié en arrêt de travail (d’origine professionnelle ou non) continue d’acquérir des congés payés.
Peu importe la durée de l’arrêt de travail, ton collaborateur acquiert des congés payés pendant toute la durée de son absence.
Le Code du travail, et plus particulièrement son article L.3141-3, qui n’assimile pas le temps d’absence en arrêt maladie pour l’acquisition de congés payés, est donc écarté au profit des textes européens. (Cass.soc 13 septembre 2023 n°22-17.340)
Cette règle est rétroactive.
Le 13 septembre dernier, la Cour de cassation a permis à une partie d’obtenir jusqu’à 10 ans de congés payés en ajoutant une condition pour déclencher la prescription. (Cass.soc 13 septembre 2023 n°22-10.259 22-11.106)
Désormais, en tant qu’employeur il faut avoir mis le salarié dans la possibilité de prendre ses congés.
Une première annonce du Conseiller-doyen de la Cour de cassation avance la possibilité pour les salariés de réclamer ces congés (et donc les indemnités découlant) depuis le 1er décembre 2009, date d’entrée en vigueur du traité européen. 🗓️
Des précisions de la part du Gouvernement sont donc très attendues !
La position de la CJUE sur l’acquisition des congés payés pendant l’arrêt
Il est possible qu’un de tes collaborateurs se retrouve avec un compteur congés payés important et qu’il ne puisse pas tout prendre à son retour d’arrêt de travail. 🎰
Un report est donc possible, mais jusqu’à quand ? Peut-on le limiter ?
En l’absence de dispositions nationales, et au vu de l’actualité, les yeux se sont tournés vers la Cour de Justice de l’Union Européenne.
En effet, la Cour européenne avait été saisie suite à des questions préjudicielles posées par le Conseil de Prud’hommes d’Agen en 2022.
Ce dernier devait traiter d’un litige dans lequel un employeur avait refusé à 5 collaborateurs de reporter, et donc de bénéficier, des jours de congés payés acquis en raison d’arrêts de travail.
Parmi ces questions, il était notamment demandé à la Cour :
- Quelle est la durée de report raisonnable de report si la période d’acquisition est d’une année ?
- À défaut de dispositions (nationale, réglementaire ou conventionnelle), le report illimité est-il possible ?
La Cour de Justice de l’Union européenne a répondu à ces questions dans son arrêt du 9 novembre dernier.
Sur la première question, la juridiction rappelle qu’il appartient aux États membres de prendre les mesures nécessaires pour assurer à chaque travailleur un congé annuel payé d’au moins 4 semaines.
Partant de ce constat, elle renvoie aux États membres la responsabilité de définir “les conditions d’exercice et de mise en œuvre du droit au congé annuel payé, en précisant les circonstances concrètes dans lesquelles les travailleurs peuvent faire usage dudit droit”. (§32)
Il revient donc à la France de définir la durée raisonnable de report. (§33)
Sur la deuxième question, le gouvernement français a tenté de la faire écarter en avançant qu’en l’absence de disposition spécifique sur cette question, c’est le délai ordinaire de prescription qui doit s’appliquer soit 3 ans. (§36)
La Cour de justice rappelle qu’il est possible pour une réglementation nationale de prévoir les modalités d’exercice du droit aux congés payés, mais également la perte de ce droit à la fin d’une période de référence ou d’une période de report si et seulement si, le travailleur qui perd son droit avait eu la possibilité de l’exercer. (§47)
Autrement dit : si le travailleur a pu prendre ses congés et qu’il ne l’a pas fait, il est possible pour la Cour, de prévoir une perte de ce droit.
Par ailleurs, la Cour de Justice relève qu’un report illimité pourrait être gravement préjudiciable pour l’employeur : un cumul trop important d’absences d’un collaborateur peut perturber l’organisation du travail. (§48)
La Cour décide donc que les États membres peuvent prévoir une limite temporelle au report des congés payés dès lors qu’elle permet de faire droit à des demandes introduites moins de 15 mois après la fin de la période de référence ouvrant droit à ce congé et limitées à deux périodes de référence consécutives. (§53)
Pourquoi 15 mois ? Car c’est le délai dans lequel le premier salarié avait saisi la juridiction.
Est-ce que la solution aurait été la même si cette action en justice s’était passée avant ou après 15 mois ?
S’agissant de l’acquisition des CP maladie, la Confédération des petites et moyennes entreprises (CPME) a lancé une pétition contre les congés payés acquis pendant les arrêts de travail.